GRAFF Arthur (1918-1920)

Arthur GRAFF fait partie de cette floraison de peintres alsaciens du XXème siècle qui méritent d’être redécouverts (cf. Saisons d’Alsace n° 21 Hiver 2003-2004). Le centième anniversaire de sa naissance fournit une bonne occasion d’évoquer sa vie et son œuvre.

 

GRAFF Arthur est né à Kogenheim le 7 janvier 1906 dans le foyer de Xavier GRAFF, marchand de cycles et d’outils agricoles, fondateur de la “Fonderie GRAFF”, et Antonia HAUS. Il débute sa formation artistique à l’école des Arts Décoratifs de Strasbourg en 1923-24 avant de se rendre à Paris où il travaille dans le célèbre atelier d’art sacré de DESVALLIERES, de Maurice DENIS et Jacques MAROGER, tout en fréquentant parallèlement d’autres ateliers (comme ceux d'Othon Friess et de Lhote). Il réside dans la capitale jusqu’en 1939, date à laquelle il revient se fixer dans son village natal. Il s’installera en 1947 à Sélestat, ville dans laquelle il résidera jusqu’à son décès le 16 février 1971.

La ville de Sélestat où ses activités culturelles furent nombreuses fut le point central d’une partie notable de son œuvre. Ainsi, il réalisa chaque année, de 1951 à 1970, la planche de couverture des annuaires de la Société des Amis de la Bibliothèque Humaniste de Sélestat, la société d’histoire locale, pour laquelle il s’inspira du riche patrimoine historique de la ville.

Nombreuses sont également les vues des environs du centre Alsace qui l'inspirèrent : la Huhnelmuhle près de Scherwiller, Ebersmunster, le Haut-Koenigsbourg, la Volerie des Aigles à Kintzheim ou la Chapelle St Sébastien de Dambach-la-Ville furent pour lui des sites pittoresques qui l’inspirèrent. Enfin, il participa encore à la fin de sa vie à la création du Cercle des Arts à Sélestat fondé dans le but de laisser s’exposer des artistes amateurs.

Il exposa ses œuvres à Strasbourg, à la librairie de la Mésange (1946), à la galerie Aktuaryus (1947), à la maison d’art alsacienne (1948), à la librairie de la rive gauche (1963) mais aussi au Musée de Haguenau (exposition collective) et bien sûr à Sélestat.

Son activité artistique se déploie essentiellement autour de la restauration d’œuvres d’art ainsi que la création picturale et le dessin. En ce qui concerne ses travaux de restauration, il débuta ce type d’activités pour le Musée des Beaux-arts de Strasbourg, en restaurant près de 85 œuvres en 1948/49. Il poursuivit cette activité de restaurateur en travaillant fréquemment pour le patrimoine religieux dans de nombreuses églises d’Alsace. C’est à partir des années 1950 que le Chanoine Bourgeois, responsable de l’art sacré lui confie les “restaurations et fresques” dans les églises comme à Huttenheim dans la chapelle Notre Dame du Grasweg, le “Couronnement de la Vierge”. Il réalisa également à Sélestat la restauration de la fresque de la Tour Neuve qui représente une crucifixion avec, de part et d’autre du Christ en Croix, la Vierge avec Sainte Foy et Saint Jean avec Saint Christophe, ainsi que, en 1954, la restauration de la fresque de  saint Barthélemy, patron tutélaire des bouchers, sur la façade de l’ancien poêle des bouchers, bâtiment voisin de l’église gothique Saint Georges.

Son œuvre témoigne d’un talent certain pour les fresques : il en réalisa plusieurs en Alsace, surtout dans le Haut-Rhin, mais, malheureusement plusieurs de celles-ci ne sont plus visibles aujourd’hui, quelques-unes dans le Bas-Rhin comme par exemple le décor extérieur de l’hostellerie St Hubert à Rathsamhausen près de Sélestat.

Parmi ses créations artistiques figurent la fresque de l’Ascension peinte en 1954 au plafond de la nef de l’église de Kogenheim qui est une composition lumineuse, aux couleurs chaudes, que l’on peut toujours admirer aujourd’hui.

Il peignit de nombreux portraits, aujourd’hui dans des collections particulières, et a également réalisé plusieurs travaux d’illustration comme l’affiche du Festival de Musique de Strasbourg, en 1948, représentant la flèche de la Cathédrale de Strasbourg vue depuis la cour du Palais Rohan ou les illustrations du livre du Muenschterspiegel de Claus Reinbold.

Il a également réalisé des dessins à la plume et au crayon ainsi que le lavis qui se caractérisent par la frénésie de leurs traits, leur fougue, la puissance de leurs clairs-obscurs. Ses peintures à la touche colorée, proches du rêve, sont, quant à elles, réalisées avec un pinceau volontaire.

En guise de conclusion citons le critique Camille RINGIER qui écrivit en 1948 au sujet du style de cet artiste : “la force, l’audace ne sont à notre avis que des moyens d’affirmer cette volonté qui le pousse à accentuer les contrastes du noir et du blanc, à lui donner toute sa valeur pour que la gravure apparaisse plus murale. La puissance et le mouvement impétueux n’excluent pas la nuance ; au contraire, en transcrivant une nuance, le dessinateur transcrit une émotion”.

 

Jean-François REITZER

en collaboration avec Madame FORNERY GRAFF