1939-1940 : le collège replié à Tournan-en-Brie

A la recherche d ‘une Maison d ‘accueil
22 septembre 1939 : Une circulaire de Fr. Félix, direc­teur du Collège, annonce aux familles de nos élèves que l’établissement de Matzenheim, situé dans une zone trop exposée à des opérations militaires, ne pourra plus accueil­lir des internes. Le spectre de la guerre épouvante l’Alsace : les évènements se précipitent ; les convois des populations évacuées venant des villages riverains du Rhin vont prendre la direction des départements du Sud-ouest de la France. Un ordre de réquisition de tous nos lits et les cantonnements transforment le Collège en une caserne ; les dortoirs sont envahis par la troupe, les clas­ses transformées en magasins de ravitaillement. Les cou­loirs et les escaliers résonnent du piétinement sempiter­nel des godillots militaires.
La même circulaire répond aux nombreuses demandes d’admission et précise que la Direction du Collège est à la recherche d’une maison permettant d’accueillir des élè­ves en nombre suffisant.
20 octobre 1939 : Le Fr. Médard annonce qu’il a trouvé, dans la région parisienne, un château qui pourrait servir de refuge au Collège, en cas de transfert.
24 octobre 1939 : Une nouvelle circulaire aux parents porte la bonne nouvelle aux familles «La maison d’accueil est trouvée. On nous cède un bel établissement, loin des dangers et des bruits de la guerre, en région sûre et tranquille, à TOURNAN-EN-BRIE (Seine et Marne). Les classes pourront s’y ouvrir sous peu. Le 6 novembre est prévu. Nous y aurons à peu près tous les degrés de nos classes à Matzenheim, en tous cas les classes qui pré­parent le CEP et le Brevet. Et les classes seront tenues par des Frères du Collège. Les parents qui attendaient cette solution et qui veulent bien nous conserver leur con­fiance, sont priés d’envoyer leur adhésion ou demandes de renseignement. »
25 octobre 1939 :Frère Félix, Directeur et Frère Fulrade, économe, partent pour Tournan. Il s’agit de voir exacte­ment les lieux et les possibilités d’accueil. Ils reviennent le 27 oct. et ne semblent pas trop déçus.
 
En route vers la région parisienne
4 novembre 1939 :L’administration se montre très pré­venante, quant à la question du transfert. Elle promet de mettre à la disposition du Collège les wagons nécessaires pour le transport du matériel et des personnes. L’exode peut devenir réalité. Les parents sont prévenus en hâte les adhésions affluent en telle quantité qu’il faut clore la liste, faute de place.
Déjà on s’affaire à Matzenheim on rassemble le maté­riel indispensable, tant pour l’internat que pour l’enseignement.
5,6,7,8 novembre Des wagons stationnent sur la voie d’embarquement, en gare d’Erstein. Entre Matzenheim et la gare d’Erstein, c’est un va-et-vient incessant : grand déménagement lits, matelas, tables, bancs d’école, maté­riel de cuisine, vaisselle, matériel scolaire...
4 novembre : Fr. Fulrade, économe, Fr. Jean-Baptiste, 2 sœurs infirmières se mettent en route pour Tournan, conduits en auto par Mr. Marcel HAMM.
Ce même jour, Fr. Jean part en train, accompagnant les wagons chargés du matériel. Il arrivera à destination le 9 oct., à 10h du soir.
13 novembre :Les élèves qui ont choisi «l’exode vers la région parisienne» se regroupent à Matzenheim. C’est à23h qu’ils s’embarquent avec les Frères Félix, Anselme, Fr. Jules, Albert, Florentin et deux autres sœurs infirmières et lingères.
14 novembre : La joyeuse compagnie des «évacués» découvrent, dans la soirée, après un long voyage, cha­cun son lit, dans des dortoirs et des chambres de fortune. La connaissance des lieux se fera le lendemain et les jours suivants.
           
A la découverte des lieux et des personnes
15 novembre: Premier jour de classe à - Tournan-en-Brie dans le «Château de Combreux» - Maison Saint Vin­cent de Paul. Tout le monde se rend compte que le châ­teau - refuge a été aménagé au prix d’efforts surhumains et de prouesses incroyables. Deux grandes salles du rez­-de-chaussée ont été transformées en réfectoires, une troi­sième en cuisine. Pas de cours asphaltées comme à Mat­zenheim, mais voici l’espace : les bois, les champs, les prairies, l’air et le soleil à flots. Les dortoirs sont aména­gés dans des chambres à 3,4,5 lits, dans 3 rotondes, et deux vastes locaux.
Les classes, au premier étage, sont suffisamment spacieu­ses et bien aérées.
Il reste encore tant à faire : des armoires pour les habits, le chauffage à installer, un préau à construire.
17 novembre : Nous connaissons maintenant les person­nes qui nous entourent
La communauté des Frères: Fr. Félix, Directeur - Fr. Fulrade (économe) - et les professeurs : Fr. Anselme, Fr. Jean, Fr. Jules, Fr. Albert, Fr. Jean-Baptiste, Fr. Séra­phin. Fr. Florentin est là aussi, pour quelques temps encore tant que l’installation n’est pas terminée.
La communauté des Sœurs : Sr. Etienne, Anselme, Béni­gna et Cordula. Elles s’occuperont de la lingerie et de l’infirmerie.
Le personnel de service : Mr. Reinbold (cuisinier) - Mr. Alphonse, Mr. Marcot, Mr. Uffenus et Fritsch Victor.
20 novembre : - Fête du Fr. Félix - Fête du Directeur, dans un cadre modeste. Un simple compliment émouvant, pathétique, dit la reconnaissance et l’admiration de tous après les récents témoignages de dévouement et d’affec­tion du Fr. Directeur.
28 novembre : Les armoires-casiers pour les habits sont définitivement en place.
29 novembre : Ce mois de novembre nous a familiarisé avec le vent et les tempêtes, car Tournan, situé sur une butte au milieu d’un pays plat, est bien le «Cap des tem­pêtes». Nos ennuis sont d’autant plus grands que la mai­son est quelque peu délabrée : portes mal closes, volets mal accrochés claquant des nuits entières, girouette grin­çante. Les nombreux carreaux brisés font le désespoir de 1' économe.
7 décembre: Le chauffage central vient d’être mis en fonction.
12 décembre : Les Frères Tarcisse, Antoine et Lando­lin, de nationalité allemande, viennent renforcer la com­munauté des Frères, après un passage au «camp de Mirecourt».
Fr. Antoine sera notre jardinier - Fr. Landolin, notre tail­leur - Fr. Tharcisse, «la bonne à tout faire» (menuisier, serrurier, bricoleur, coiffeur.. .électricien) -
13 décembre: Inquiétude au sujet du combustible -approvisionnement difficile.
Un début de printemps radieux
3 mars 1940 : SOIREE RECREATIVE DE CARNAVAL
Nous ne pouvons recevoir le Prince Carnaval qu’à la mi-carême. Le programme de la soirée récréative, les lon­gues séances de préparation et de répétitions de la cho­rale, de la fanfare et des acteurs, ont garantie un franc succès.
Au programme de la soirée
-          Le drapeau de Beets (pas redoublés) - Kessels
-          La Marche des Collégiens (choeur)
-           L’examen pour rire (sketch comique)
-          Le petit Postillon, polka - Kessels
-          Chez le Barbier (système hop-hop) pantomime
-          Auf, frisch auf. .. choeur - Antoine
-          CABUSSAT NE SAIT PAS L’ORTHOGRAPHE - Labiche
-          La Youtse, chœur - Bovet
-          Par monts et par vaux (galop) - Colint
-          L’EXPIATION (drame en 3 actes) - Lebardin
-          Les Mamans (chœur) - Botrel
-          Concerto, violon et piano - Riedweg
-          Souvenir de Maasluis - Torelli.
 
13 mars : A la découverte de PARIS - Le projet de visite de la capitale, proposé par les élèves, adopté par la Direc­tion n’a pu être réalisé pendant les vacances de Noël, vues les conditions atmosphériques, l’abondance de la neige. (car bloqué).
La visite de Paris se fait sous l’aimable et compétente Direction de Mr. Auboire, le directeur de l’Institution St Vincent de Paul de Combreux. Au programme : - visite de la Basilique du Sacré Coeur - Tour Eiffel - L’Arc de triomphe - Ecole militaire - Invalides - Musée de l’Armée -  Le Louvre - La Cathédrale Notre-Dame.
Une journée des plus mémorables! Enchantement unanime
17 mars : Départ des élèves pour les vacances de Pâques... Les Haut-Rhinois, avec Fr. Fulrade ; les Bas­-Rhinois et les Mosellans, avec Fr. Félix, directeur.
5 avril : Les élèves reviennent des vacances en famille.
10 avril : Célébration de la fête patronale de Saint-Joseph, le 19 mars étant tombé en Semaine Sainte.
Le Doyen Calot préside l’Eucharistie, assisté par le P. Combrichon (notre aumônier).
5 mai : fête de Sainte Jeanne d’Arc. Messe à l’Eglise ~paroissiale, avec la participation de notre «harmonie». Concert devant le Monument aux Morts.

9 mai : Communion solennelle de quelques élèves - Mal­gré la situation d’exil, et l’atmosphère politique tendue, la ferveur et la joie demeurent : concert, banquet, musi­que et chants de la chorale.